Voici qu’arrive la dernière semaine de la campagne électorale.
Nul besoin de calendrier pour le savoir : comme la papale fumée blanche, l’épais panache d’émotions sortant des médias indique avec certitude l’imminence du premier tour.
C’est l’heure pour les candidats de jeter leur bonnet par-dessus les moulins, oubliant ou reniant leurs programmes initiaux pour tenter, à coups de « punchlines » réductrices, une ultime séduction des hésitants.
Le vote se fera donc comme d’habitude dans cette ambiance rendue survoltée par des médias dont c’est le métier et le business, conduisant à faire produire notre décision d’électeur par notre infra-cerveau reptilien : une décision réflexe, de peur ou de passion. Et ce crescendo d’émotion atteindra son sommet au cours du face-à-face de western du deuxième tour, jusqu’à son dénouement dramatisé.
On marche sur la tête. Sur deux plans.
La qualité de la décision : voir baser sur l’émotion, par définition réductrice, fragile et fugitive, le choix du Président, du programme de gouvernement de 5 ans d’un pays comme la France, a quelque chose de stressant, entre dérisoire et pathétique.
Dérisoire si cela exprime que le premier de nos gouvernants est en réalité sans pouvoir, pathétique si c’est ainsi que nous concevons l’essence de la décision citoyenne.
Comment ne pas comprendre que dans ces conditions l’électeur, matraqué émotionnellement, sommé de décider sans raisonner, hésite jusqu’à l’isoloir ?
Comment n’être pas tenté de voir, dans l’infime différence de voix séparant souvent le vainqueur et le vaincu du 2ème tour, le résultat d’un pile ou face électoral, abandonné au seul hasard?
L’adhésion à la réalisation : passé le point d’orgue émotionnel de la soirée électorale, les quinquets médiatiques s’éteignent et les plateaux se vident.
Place alors à la période de mise en œuvre du programme présidentiel, au dur retour aux réalités; très vite, les déceptions, les sentiments de trahison apparaissent; très vite, les résistances se développent, les soutiens se délitent. Les actions promises, frottant à mille endroits, peinent à se concrétiser.
Tout ceci pourrait être évité en grande partie. En réduisant cette brutalité de passage de l’élection au mandat, ce véritable grand huit émotionnel. La fin de l’élection doit nous préparer au début de mandat. L’état de grâce des premiers mois ne doit pas être la salle de réveil des songes électoraux.
Il ne s’agit pas de chasser toute émotion du processus électoral : nous sommes latins, ce serait impossible, à supposer que ce soit souhaitable. Nous avons besoin de ressentir les candidats.
Mais dans ce processus, il s’agit de mettre les facteurs dans le bon ordre : exprimer ce que nous attendons, pré qualifier des personnalités et des programmes, préciser et ajuster ces derniers en fonction des réactions d’émotion et de raison de la campagne, …. et voter principalement sur les programmes ainsi ajustés, en fonction de leur aptitude à répondre aux attentes, parce que là est l’essentiel.
Le candidat devrait être vu comme la condition de succès, l’avocat de son programme, non le sujet principal.
Et là, on verrait sans doute des électeurs plus sûrs d’un choix mieux réfléchi, plus décidés à voter, mieux préparés à en soutenir la réalisation. Et des majorités consistantes se dégager.
Parce que l’action collective dans la durée ne se passe pas d’elle, parce que son sens partagé sert l’efficacité, la raison doit avoir le dernier mot dans cette élection.
Exigeons la mise en place d’un processus électoral qui le garantisse !
Daniel Rigaud
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